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Pourquoi l’attribution au clic ne doit pas piloter les tableaux de bord de direction

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Jenny Williamson remet en cause la place démesurée des modèles d’attribution fondés sur le clic dans le pilotage marketing et les décisions budgétaires au niveau direction.

Pour Jenny Williamson, Associate Director Paid Media au sein d’une grande agence internationale de marketing digital, les modèles classiques (dernier clic, premier clic, linéaire, dépréciation temporelle, etc.) ont un point commun : ils distribuent le crédit en fonction des clics mesurés sur quelques points de contact. C’est simple à instrumenter, facile à expliquer et rassurant sur un tableau de bord.

Mais cette simplicité repose sur une vision très réductrice du parcours client :

  • De nombreux contacts ne génèrent aucun clic traçable (vidéos, réseaux sociaux, contenus éditoriaux, bouche-à-oreille, recommandations dans des LLM, etc.),
  • Les parcours se déroulent sur plusieurs appareils, canaux et parfois hors ligne, ce qui échappe en grande partie aux tags,
  • Les modèles basés sur le dernier clic favorisent mécaniquement le bas de tunnel (remarketing, recherches de marque) au détriment de tout ce qui crée la demande en amont.

Les tableaux de bord orientés clics donnent l’illusion que seules les campagnes de retargeting et les requêtes de marque « font le travail », puisque ce sont elles qui captent le dernier clic. Les investissements de notoriété, de contenu, de vidéo, d’influence ou de relations presse restent presque invisibles alors qu’ils préparent une grande partie des conversions futures.

À cela s’ajoutent plusieurs effets de bord décrits dans l’article :

  • Budgets déplacés vers ce qui « performe » sur le papier, jusqu’à assécher la génération de demande,
  • Affaiblissement progressif de la marque (baisse de la notoriété, de la fidélité, de la valeur vie client),
  • Objectifs mal alignés entre équipes (achat média obsédé par le clic, créa qui cherche le clic facile, analytique qui valide les modèles les plus “propres” plutôt que les plus justes),
  • Confiance excessive dans les chiffres fournis par les plateformes, qui ont intérêt à s’attribuer une part maximale des conversions.

Dans un environnement où la protection de la vie privée limite le suivi individuel, où les cookies tiers disparaissent et où les identifiants se fragmentent, cette dépendance au clic devient encore plus fragile : l’hypothèse « ce clic vient de telle personne et a généré telle conversion » se vérifie de moins en moins.


Vers une mesure orientée résultats, pas seulement clics

L’article de Jenny Williamson ne propose pas d’abandonner les clics, mais de les replacer à leur juste place : un signal parmi d’autres, utile pour lire l’engagement, mais insuffisant pour piloter la stratégie.

Plusieurs pistes se dégagent pour construire un cadre de mesure plus solide :

  • Modélisation mix marketing (MMM) : analyse statistique des contributions par canal (online, offline, payant, organique, relations presse…) à partir de données agrégées, pour relier les investissements aux ventes ou au chiffre d’affaires sans dépendre de chaque clic utilisateur.
  • Attribution multi-touch (MTA) : analyse des chemins utilisateurs quand le suivi le permet, non comme vérité absolue, mais comme éclairage complémentaire sur la succession des points de contact.
  • Tests d’incrémentalité : mesure de ce que le marketing ajoute réellement, en comparant des groupes exposés et non exposés afin d’isoler les conversions qui n’auraient pas eu lieu sans la campagne.
  • Indicateurs de cycle de vie client : valeur vie client (LTV), coût d’acquisition, taux de rétention, cohorte, durée de remboursement du coût d’acquisition, pour relier les dépenses média à la création de valeur durable.
  • Mesure de l’attention et de la marque : mémorisation publicitaire, notoriété, intention déclarée, part de voix, évolution du sentiment, temps réellement passé exposé à un message.

Pour le comité de direction, cela implique des tableaux de bord qui mettent en avant :

  • Le chiffre d’affaires, la marge, le coût d’acquisition, la valeur vie client, la part de marché, la progression de la notoriété,
  • Des enseignements issus de modèles mixtes (MMM, tests d’incrémentalité et analyses de cohorte) plutôt que des colonnes de clics, de taux de clics et de conversions au dernier clic.

Le changement ne se fait pas en un jour. L’auteure recommande une transition progressive : introduction de tests d’incrémentalité sur une part limitée du budget, mise en place d’un MMM annuel ou semestriel, évolution graduelle des KPI présentés aux dirigeants, accompagnée d’un travail pédagogique.

Au final, pour Jenny Williamson, le clic continue d’avoir une valeur informative, mais une stratégie pilotée uniquement par ce signal finit par déformer la réalité du parcours client, appauvrir la marque et orienter les budgets vers le court terme. Une mesure sérieuse replace le clic à sa place, au service d’une lecture plus large de l’impact réel du marketing sur le business.

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