Accueil GEO et IA L’Espagne prépare des amendes de 35 millions d’euros contre les IA mal étiquetées

L’Espagne prépare des amendes de 35 millions d’euros contre les IA mal étiquetées

par Jordan Belly
Espagne et IA

L’Espagne franchit un cap décisif dans la régulation de l’intelligence artificielle. Le Conseil des ministres a approuvé mardi l’envoi au Congrès d’un projet de loi qui pourrait sanctionner les entreprises d’IA de jusqu’à 35 millions d’euros pour défaut d’étiquetage des contenus générés. Une mesure qui vise directement les deepfakes et autres contenus trompeurs.

Cette initiative s’inscrit dans l’application de la loi européenne sur l’IA, mais l’Espagne va plus loin en fixant des sanctions particulièrement dissuasives. Pour les entreprises du secteur, cette réglementation annonce un tournant majeur dans la responsabilité des acteurs de l’IA générative.

Des sanctions graduées selon la gravité des infractions

Le projet de loi espagnol établit une classification claire des infractions liées à l’utilisation de l’intelligence artificielle, avec des sanctions proportionnelles à leur gravité.

Infractions graves : jusqu’à 35 millions d’euros

L’étiquetage incorrect des contenus IA constitue une infraction grave, passible d’amendes comprises entre 7,5 et 35 millions d’euros ou entre 2 et 7 % du chiffre d’affaires global de l’entreprise. Cette mesure cible directement les contenus générés par IA qui ne seraient pas clairement identifiés comme tels, notamment les deepfakes.

Le texte prévoit toutefois des sanctions allégées pour les PME, reconnaissant ainsi les différences de moyens entre les acteurs du marché.

Infractions moyennes : contrôle biométrique non supervisé

Les entreprises qui utilisent la biométrie pour contrôler l’assiduité de leurs employés sans supervision humaine s’exposent à des amendes de 500 000 à 7,5 millions d’euros ou de 1 à 2 % du chiffre d’affaires annuel global.

Cette disposition vise à encadrer l’usage croissant des systèmes de reconnaissance biométrique sur les lieux de travail, en imposant un contrôle humain sur ces technologies.

Pratiques interdites : manipulation et discrimination

Au-delà des questions d’étiquetage, le projet de loi espagnol bannit plusieurs pratiques jugées dangereuses pour les citoyens.

Techniques subliminales prohibées

Le texte interdit l’usage de techniques subliminales, incluant les « images ou sons imperceptibles » destinés à manipuler les décisions sans consentement. L’exemple donné par le gouvernement est particulièrement parlant : un chatbot qui identifierait des utilisateurs avec une addiction au jeu pour les encourager à parier.

Fin du profilage discriminatoire

Les entreprises d’IA ne pourront plus classifier les personnes selon leur race, opinions politiques, religion ou orientation sexuelle en se basant sur leurs données biométriques ou leur présence sur les réseaux sociaux.

Cette interdiction répond notamment aux critiques formulées contre un algorithme utilisé dans une prison catalane pour évaluer le risque de récidive des détenus.

Une vision de l’IA au service du bien commun

Óscar López, ministre espagnol de la Transformation numérique, a défendu une approche claire : « L’intelligence artificielle doit nous aider à améliorer le monde dans lequel nous vivons. »

Le gouvernement entend orienter l’usage de l’IA vers des applications bénéfiques :

  • Recherche médicale,
  • Prévention des catastrophes,
  • Amélioration du trafic urbain.

L’objectif affiché est d’éviter que l’IA serve à « diffuser des fake news, mensonges et diffamations. »

Pouvoir de retrait en cas d’accident grave

Le projet de loi confère au gouvernement espagnol le pouvoir de retirer temporairement un système d’IA du territoire national « lorsqu’il a causé un accident grave, comme la mort d’une personne ».

Cette disposition d’urgence témoigne de la volonté des autorités de réagir rapidement face aux dérives potentielles de l’IA, particulièrement dans les secteurs critiques.

Prochaines étapes : l’examen parlementaire

Le projet de loi nécessite encore l’approbation du Parlement avant d’entrer en vigueur. Cette étape sera cruciale pour observer les éventuels amendements et ajustements du texte.

L’Espagne rejoint ainsi les pays européens pionniers dans la régulation stricte de l’intelligence artificielle, en complément du cadre réglementaire européen déjà en place.

Les points clés à retenir

Sur les sanctions :

  • Amendes de 7,5 à 35 millions d’euros pour défaut d’étiquetage IA,
  • Sanctions modulées selon la taille de l’entreprise,
  • Possibilité de calcul en pourcentage du chiffre d’affaires global.

Sur les pratiques interdites :

  • Techniques subliminales de manipulation,
  • Profilage discriminatoire basé sur les données biométriques,
  • Contrôle biométrique des employés sans supervision humaine.

Sur la philosophie :

  • IA orientée vers des applications d’intérêt général,
  • Lutte contre la désinformation et les contenus trompeurs,
  • Pouvoir de retrait d’urgence en cas d’accident grave.

À découvrir également